Vol 1515 pour Marignane Part -15- 4


Générique, musique applaudissements, foule en délire, tout ça……..

On a roulé « gros pépère » jusqu’à son hangar, sans se presser, et on est tous rentrés dans la maison.
Là, bien sur on a causé et Viktor a raconté comment il avait vraiment perdu sa licence un jour :
« Quand je suis arrivé ce matin là au hangar à Pulkovo (aéroport de Saint Petersbourg) je voulais pas faire d’histoire, je voulais juste prendre mon avion et rentrer chez moi, mais voilà, le mur venait de tomber, tout le monde était partagé entre bonheur et inquiétude, et un petit ratier du NKVD qui était basé sur Pulkovo a cru bon de faire du zèle, et pour se faire bien voir de ses futurs supérieurs, il a commencé à essayer de « m’interdire de prendre l’air » sous prétexte que CCCP était encore peint sur le flan de mon zinc. Moi, pour pas avoir d’histoires, je lui promet de mettre un coup de peinture dessus aussitôt à la maison, mais lui, en vertu d’un règlement qu’il venait d’inventer, commence à se faire un délire sur le thème « Je vous préviens je vous aurai prévenu, si ça continue faudra que ça cesse, surtout que si ça continue comme ça ya aucune raison pour que ça s’arrête, vous me connaissez sous mon bon côté mais vous allez apprendre à me connaître du mauvais côté » Bref, on aurait dit un épisode du soldat Chveïk. Puis voyant sans doute que je ne répondais pas, l’individu commence à franchement m’engueuler, et il me tape du doigt sur le sternum. Là, je rêve, il le fait une fois, deux fois, trois fois, et à la troisième, j’ai démarré : « Ecoute bonhomme » je lui ai dit, en lui tapant mon index sur le sternum aussi, et c’est là que ça a foiré en fait, parce que le gazier en question devait bien peser ses 60 Kg, et mon coup d’index un peu appuyé l’a fait reculer de deux pas, juste à l’endroit ou ses talons se sont posés sur une flaque d’huile. Il a perdu le contrôle, les pieds sont partis en avant, les bras en arrière il est reste comme en lévitation pendant une demie seconde, juste le temps de planter son pouce dans l’œil de son chef qui était entré en douce en l’entendant gueuler, puis il s’est écrasé le dos bien à plat sur une boite de graisse, une clef de 24, un pied de biche et, surtout, un sac en papier rempli de semences de tapissier. Après coup, on a supposé que c’est le pied de biche qui lui a pété deux côtes, mais pour les semences, il a fallu les retirer une à une à la pince à épiler, because il était pas lourd mais il est tombé fort, alors elles sont rentrées profond. Il gueulait ! Et son bel uniforme sur mesure était un peu ruiné par la graisse aussi.

Il était beau… avant

Son chef lui, malgré son œil au beurre noir, avait plutôt tendance à rigoler, mais l’autre abruti connaissait des gens encore haut placé, alors plus de licence Viktor !
Le plus rigolo dans l’histoire c’est que le lendemain, les gens haut placés étaient descendu d’un étage, et le chef de l’autre naze me rendait ma licence en douce.
J’aime autant vous dire que l’Antonov a pas mis longtemps à décoller, et que j’ai passé un petit moment avant de revenir à Pulkovo, on sait jamais. »
Comme a chaque fois que Viktor raconte, tout le monde pleure de rire.
Le lendemain, quand Olga rentre dans la datcha, moi qui la connait je sens bien qu’elle prépare un truc. Elle se plane devant Juju, et lui fait : « Toi tu viens avec moi, je vais te faire voir quelque chose ! » Juju est un peu soufflée, et elle suit, avec une très visible envie de latter le fion de la dite Olga. Moi, je sais ou elles vont, et je sais ce que ça va donner, et ça me fait vraiment plaisir.
En effet deux heures plus tard, une Juju rayonnante reviens bras dessus bras dessous avec Olga.
Et elle commence : « Vache une galerie de mine comme stand, et je connaissais pas la moitie des flingues, et j’ai pu tout essayer, et c’était génial ! Et de remplacer les deux pipelettes en nous décrivant par le menu la collection privée de Olga : « tu te rends compte ? Elle a même un fusil anti char, j’ai cru me démonter l’épaule, un truc genre fusil normal, mais qui tire un mini obus, et puis elle a aussi… »

La stand de tir privé de Olga

Avec Viktor, on échange un regard complice, la hache de guerre est enterree, ces deux là vont êtres les meilleures amies du monde. C’est un peu l’effet magique du lieu, ou l’influence de ce bon gros géant qu’est Viktor, et aussi le magnétisme de Olga, qui fait que quoi qu’elle fasse, quelle que soit la vacherie, on ne peut pas lui en vouloir très longtemps.
Les jours suivants s’écoulent paisiblement, et après toutes les épreuves de ce voyage, c’est une bénédiction. Aussi, quand le message radio disant que l’Intrépide est prêt nous parvient, c’est une équipe sereine qui embarque dans l’Antonov pour rejoindre Pulkovo.
Bien sûr, les adieux sont difficiles, bien que légèrement adoucis par la promesse de se revoir très vite, ici ou sur Lingua Franca. Après les embrassades, et la photo, nous voici de retour dans notre bel avion, enfin le rose persistant mis à part.

Photo de pilotes

Juste avant que le moteur ne tousse, Viktor a le temps de crier « Vous faites une bise à Ayiki pour moi hein » et l’hélice tourne dans les pétarades du moulin.
Depuis la tour, le taxi est autorisé jusqu’en bout de piste, et nous voyons Viktor et Olga nous faire un signe avant qu’ils ne remontent dans le gros pépère.
Les automatismes reviennent, le régime moteur, dix degrés aux flaps, ca roule, de plus en plus vite, et l’Intrépide s’élève. Cap sur la maison !
Le voyage de retour se fait sans anicroche, dans un avion révisé avec soin par les mécanos de Pulkovo, et a une vitesse record. A force de se frotter aux nuages, le rose a fini par disparaître, ça va nous éviter de nous faire chambrer, c’est pas un mal.
Après quelques escales tout de même, nous voyons enfin la piste de Nokolo se dessiner. Un premier passage pour vérifier les conditions, un virage large et la voix de Lucien dans le casque :
« Ah ba vous revoilà les filles, ça fait plaisir »
Juju au micro : « Lucien, t’es dans la tour ? C’est une surprise ! »
Je place le zinc en ligne, pile entre le phare et l’arbre, arrondis un peu la descente, et les roues chuintent sur la piste.
Taxi jusqu’en bout de piste, contact coupé, et le silence. On est a la maison !


J’ai un doute, d’un coup, en attrapant la sacoche avec les papiers de l’avion, elle me parait lourde et rebondie. Je l’ouvre et en sort un magnifique œuf Fabergé !!! On se regarde avec Juju, et d’une seule voix : « Olgaaaaaaaaaaa tu fais chier!!!! »

Ça fait cher l’omelette

 

 

FIN