
Vol 1515 Pour Marignane -Episode 10 – Part 2
(Episode 10 -Part 2- Full View on THE City that never sleeps et un tipeu de ce cher « Franky The Voice » pask bon : zavez kaméme été sages… mais n’abusez pas nanpu hein…)
Francis Andrew Sixpence, 3ème du nom, « Dieu le Père » pour les intimes, prend une profonde inspiration avant de reprendre :
« Je te prierais de bien vouloir lever la tête et de me regarder quand je te parle, jeune fille ! »
Je m’exécute donc en jetant un regard un coin sur l’assistance toujours aussi silencieuse : la majeur partie du gotha de la Police New Yorkaise se tient là face à moi… l’Oncle Paul, Chef des Détectives, a enfin enlevé ses lunettes de soleil et est venu se placer sur ma gauche ; l’Oncle Jelly, Chef de OCCB(1), reste monolithique ; Tante Bekkie, Chef du Service des Patrouilles, me lance un discret clin d’œil ; l’Oncle Dennis, Chef des Affaires Internes, fidèle à lui-même, semble avoir avalé un manche de pelle ; Tante Connie, Chef Adjoint et Directrice de l’Académie de Police ressemble à ce qu’elle est devenue : une prof coincée ; Cousine Vicky « J’me la pète », Lieutenant au 33ème, a toujours l’air aussi pimbêche ; l’Oncle Jack, Chef Assistant commandant de Brooklyn Nord, parait n’avoir toujours pas son quota de sommeil ; Tante Telma, Inspecteur Général commandant la Division Spéciale des Victimes me détaille de la tête aux pieds ; Tante Jennifer, Inspecteur Général Adjoint à la Brigade des Crimes Majeurs à l’air de s’emmerder à cent balles de l’heure ; l’Oncle Anthony, Chef Assistant des Détectives et responsable du Bureau des Narcotiques me gratifie d’un regard et d’un sourire complices ; la Tante Chelsea, Chef de Manhattan Sud, essaie de se donner une contenance en admirant sa récente manucure tandis que, nonchalamment assis sur le vaste canapé de cuir sombre, l’Oncle Tob, Chef Psychothérapeute Responsable de l’Unité Psychologique d’Assistance aux Victimes et Officiers de Police semble totalement étranger à tout se qui se passe autour de lui…


« Dieu le Père » se défait lentement de sa vareuse d’uniforme -qu’il ne porte qu’exceptionnellement- et l’accroche à un porte-manteau supportant déjà sa casquette couverte de dorures avant de reprendre :
« Si je ne t’avais pas envoyée chercher : tu ne serais pas venue !… Il y a plusieurs mois de ça, quand tu as demandée ton détachement pour diriger le LFPD, j’ai dis « ok ! » : ça sera une bonne expérience pour ta carrière et te retrouver en plus dans un cadre bucolique ne pourra te faire que du bien… Je ne pensais pas, par contre, que ça générerait chez toi une amnésie sélective… Ni un relâchement de ta conduite professionnelle !… Puis-je savoir qui dirige ton Département pendant que tu joues les Maryse Bastié(2) ? »

Je prends mon courage à deux mains, relève enfin la tête et le fixe bien en face après une difficile déglutition :
« Ben, mon Adjointe, Chou… heu Cénédhra. Pis si y avait un souci elle peut me joindre par radio, d’abord… Et en plus y a Lucien « poil au… » heu… Lucien Cordier, le Chef de la Police de l’Air de Nokolo, qu’est là aussi au cas où elle aurait un blème. C’est un vieux routier l’Lucien : y connait son affaire, crois moi… Pis y a aussi tout le Staff hein : Karine, Morph, Elheana, Mel et Tilu, Rosar, toussa quoi… -et je trouve bon d’ajouter pour que le LFPD ne passe pas pour un service de péquenots- et pis y a aussi tous les Officiers bien sûr hein, sulla brèche 24/24… Donc ça roule tranquille et j’peux t’dire qu’on chôme pô, hein… Là, je donne juste un coup de main pendant mes congés pask j’ai mon brevet de pilote hein, pour m’faire plaisir et pour rende sévice, mais c’est tout, t’vois… ».
L’assistance me fixe décontenancée. Papa fait mine de comprendre avec une légère moue de circonstance et de renchérir :
« Et donc, je suppose que toutes ces trépidantes occupations t’ont empêchée de nous prévenir que tu passais par chez toi ? Tout comme je suppose qu’elles t’ont empêchée de téléphoner ou de répondre aux divers emails que l’on t’a envoyés ? »
« Ben ch’teu f’rais rappeler que j’vous appelle toutes les s’maines, d’abord ! Mais là j’t’ais en vol hein, alors les mails heu… Pis aux escales on n’a pô trop l’temps pour toussa, hein… Pis en plus mon portab’ y captait pô alors… Pis après j’avais pus d’batrie et j’trouvais pus mon chargeur pask’il était tout au fond de la soute dans ma valoche, sous le fret des passagers quoi… Ca arrive ça, hein… »
Sa Majesté opine du chef en grommelant :
« Oui : surtout à toi quand tu nous prends pour des cons, ta mère et moi ! »
Je bondis :
« Méééheuuuu ! Même pô vrai ! En plus, tu parles que M’man elle doit s’morfonde ! Vu l’époque où qu’on est a doit ête comme d’hab’ en train d’se faire dorer comme un toast au foie gras sulla plage de Malibou ((d’ficéle [de ch’val… tibidibidibidiiiii toubaaaaa wwwhhhaaa… Désolée, hein = les nerfs !… Ndlr])) et qu’à doit pô s’ennuyer en plus… »
« Et une bonne paire de claques dans ta gueule pour t’apprendre à respecter ta mère et la syntaxe, ça te conviendrait en guise de bienvenue, espèce de charretière ? » assène derrière moi une voix, d’habitude suave et que je ne reconnais que trop bien : Maman !!!
Là = c’est THE cata dans toute sa splendeur et misère des courtes tisanes !!! Et, même si les tisaneries les plus courtes sont souvent les meilleures, c’est moi qui vais me prendre un bouillon, j’l’sens bien…
Surgit de nulle part donc : Maman !!! Helen Sixpence, Chef Adjoint commandant la Brigade des Crimes Majeurs, se campe devant moi plus belle que jamais et plus furibarde qu’un taureau de rodéo. Une chape de plomb s’est abattue sur la pièce et personne dans ces cas là, je dis bien PERSONNE pas même Papa, n’oserait la ramener…
« Non mais par curiosité, regardez moi cette touche ! Tu as vu à quoi tu ressembles, espèce de souillon ? Et tu sais quel jour nous sommes en plus, hein ? Je te parle, Justine Sixpence ! »
Je me dandine en matant mes groles ((c’est vrai qu’y faudrait que j’les cire, tiens…)) :
« Ben heu… Mercredi, nan ?… »
Maman a une moue et se tourne vers Papa :
« Et toi, tu attends quoi pour aller te changer : un mot écrit de ta mère, je suppose ? »
« Dieu le Père », celui qui fait marcher à la baguette plus de 35.000 flicards, file sans demander son reste dans le cabinet de toilette d’où il était sorti tout à l’heure, tandis que Maman continue sur sa lancée :
« Nous sommes, très exactement, le jour du 108ème anniversaire de l’arrière grand-tante Felicia, Mademoiselle Sixpence-pue-la-sueur-le-gasoil-et-l’huile-de-vidange !!! Ainsi que -comme toutes celles et ceux qui sont ici présents- je te l’ai mailé, écrit, et dit sur mes différents messages téléphoniques… »
Méde ! pense-je… Je l’avais complétement oubliée la vieille buse ! Je la croyais même déjà clabotée, dis donc… Putaing, 108 balais ! La vache : à s’accroche aux branches l’vieux fossile ! Sont pas prêts de toucher l’héritage moi j’vous l’dis !… Pis j’sens pas tant qu’ça en plus, kaméme !
« Heu… Ben, heu… s’t’a dire que j’a pô vu, M’man, j’t’assure… J’a du zapper par mégade ! Sinon j’aurais répondu, t’penses bien… »
Et c’est là où, fidèle à elle-même, cette garce de cousine Vicky démontre, une fois plus comme s’il en était besoin, quelle sorte de pétasse elle peut être :
« Ben, MOI, j’ai eue une « confirmation de lecture » de mon mail, donc ça veut dire que tu l’as lu ! »
Et vlan : prends ça dans ta mouille ma Juju !… Mais j’vais pas m’laisser faire par cette pouffe, namého :
« Ha ouais ? Miss-jupette-ras-la-moule ? Fais-moi marrer, tiens : j’ai d’jà les lèvres gercées ! Toi, tu s’ras toujours aussi pétasse, hein ? Et si je te marave la gueule direct sul’tapis là, d’vant tout l’monde, comme quand j’t’avais collée la toise de ta vie quand t’avais 11 piges, hein ? Tu t’rappelles : quand t’avais tout coupé les ch’veux d’ma Barbie « Sauveteuse » qu’l’Oncle Tony y m’avait offerte ? Allez viens, choucroune : chuis en forme là ! Tiens, en plus comme chuis pô vacharde, ch’teu laisse une chance : l’Oncle Tony justement, ben y va m’attacher la main droite dans l’dos, pour t’laisser ta chance ! Pis ensuite tu viendras pleurer ta race quand ch’teu cracherai ta putain d’oreille droite dans l’caniveau après t’l’avoir arrachée avec les dents ! Grosse pouffe !… »
L’Oncle Tony -j’l’adore Anthony, c’est mon préféré- en fouillant ses poches à la recherche de ses pinces (3) est le seul à se fendre la poire sous les yeux médusés des autres membres de la famille. Mais la pétasse -tout en restant à bonne distance de moi- continue d’me narguer :
« Ha ouais, ma salope ! Ha ouais ??? Et qui c’est d’abord qu’avait arraché les zyeux d’mon ours en pluche, hein, hein, hein ? S’pas toi p’t’éte ? »
Là j’me marre franco ((Ca marche pô avec Pinochet ou Staline : on a essayé… Ndlr)) :
« Ha, ha, ha ! Même pas vrai, même pas vrai !!! Pove conne : t’as jamais rien pigé à rien toi ! On t’dit « bonjour » et tu coures chercher un Dictionnaire ! T’es trop conne, tiens ! Tu m’fais trop pitié d’ta race ! Ca m’rappelle quand t’étais encore simple flicarde au 41ème et que j’étais ton Sergent… enfin bref, pôve tâche, t’as qu’à d’mander à la cousine Jess : c’est l’cousin Terry qu’avait saccagé ton pove Nounours, tout ça pour te consoler et aller jouer au docteur dans la cabane à outils de l’Oncle Dennis !… En plus, jouer encore au nounours à onze ans… kof kof kof… ».
« Haaaannn !!! Même pas vrai, même pas vrai ! » Qu’elle braille la morue.
« DE QUOI ??!!! Meugle l’Oncle Dennis enfin libéré de son manche de pelle, dans MA cabane à outils ???!!! »
« Tu parles, c’est là où k’y planque les photos de ses gonzesses… » Lâche-t-elle alors –bien inconsciemment, je le reconnais…
« Haaaa ! Exulte-je : tu vois que tu y étais ! Et toc ! »
« Toi : on va avoir une TRES sérieuse explication une fois à la maison » martèle Tante Rebecca avec une voix d’outre-tombe à l’attention du Chef des Affaires Internes…
« LA FERME ! » Hurle Maman pétrifiant l’assemblée avant de reprendre :
« Vous laverez votre linge sale en famille -c’est le cas de le dire- mais en attendant TOI, ma fille, tu vas me faire le plaisir de me suivre et de venir à la fête de Tante Felicia ! »
Je maugrée et ronchonne :
« J’ira pô ! D’ façon ala jamais pu m’blairer la vieille momie, alors… »
« Comment ?… » susurre Maman en plantant ses yeux d’azur dans les miens.
« Nan, nan : rien… Minaude-je avant de remarmonner : m’en fous d’façon : j’ira pô ! Pis ch’ra malade, d’abord ! »
Maman, les bras croisés et les didous jouant du piano sur ses coudes, me fixe avec l’intensité d’un Missile Balistique Intercontinental au point d’explosion croisé avec un Pit-Bull à la diète au moment où Papa reparait vêtu d’un très joli costume trois-pièces bleu cendré qui lui sied à merveille ((j’l’adore dans ce costard…)) et où un grondement sourd monte lentement dans la pièce…
C’est comme une sorte de ronronnement qui monte crescendo, un peu comme les chants des acteurs du Théâtre No Japonais : lointain et guttural au départ, puis ça ronfle, ça enfle, ça gronde, ça monte et d’un seul coup ça rugit comme un lion acculé :

«RHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOHHHHHHHHHHHAAAAAAAAAAAAAA MAIS MEEEEEEEERRRRRRRRDDDDDDDDDEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE A LA FIN !!!!!!!!!!!!!!! » Hurle l’Oncle Tob en bondissant du canapé comme une grenouille qui aurait collée ses doigts dans une prise de 380 volts.
« La ferme !!! Vos gueules ! Taisez-vous, merde ! J’en peux plus ! Au secours ! Mon Dieu aidez-moi ! Je craaaaqquueee !!! J’explose ! J’en ai maaarrreeee ! Faut que ça sorte toute cette merde, que ça expulse, que ça gicle !!! Non mais regardez-vous, bande de dégénérés psychotiques ! Tas de fientes névropathes ! Je vais vous buter ! Je vais commettre un génocide ! Libérer l’humanité de vos insignifiantes et chiantes existences ! Je vais vous vitrioler la gueule ! Vous couper les doigts et les orteils au sécateur avant d’’vous empaler sur des cactus géants dans le désert du Nevada et de vous badigeonner de mazout avant d’y foutre le feu pendant que j’irai me rouler dans le sable couvert de crème fouettée avec des myosotis dans l’cul en vidant des bouteilles de Vodka avec une douzaine de putes bimbos aux nibards comme des obus de 380 !!! Tas d’immondes blattes avariées ! Sangsues psychanalytiques !!! Je ne supporte plus vos jérémiades perpétuelles, vos petites morigénassions dénuées de sens, vos névroses, psychoses et dépressions en tout genre qui me font gerber, qui me font chhhiiiiiiieeeeeeeeerrrrrrrrrrr !!!!!!! Je vous HAIS !!! Je vous vomis et je vous conchie bande de branques !!! Tas de dingues congénitaux !!! Faut que je me soulage ! Que je passe mes nerfs !!! Puttttaaiiiinnn !!!! J’en peux pluuusss, espèces de grumaux !!! »
Sous les yeux médusés de l’assistance il se rue alors comme un fauve affamé sur le trop mignon Captain Ray Bear, l’ours en peluche Mascotte du NYPD qui trône sur un fauteuil, l’attrape à bras le corps, l’étrenne, l’embrasse puis le secoue convulsivement :

« Tu me comprends toi, hein ? Tu me comprends ! Oh oui, tu sais bien ce que je veux dire !!! Puttttaaiiiinnn faut que je me passe les nerfs !!! J’en peux plus de toutes vos macaqueries d’Irlando-Italo-Français de meeerrrddeeee !!! »
Il balance ce pauvre nounours à l’autre bout de la pièce, se jette sur l’Oncle Jelly statufié, lui arrache littéralement le Colt 45 qui est niché sous son aisselle gauche puis se retourne et vide le chargeur sur le fauteuil où se trouvait Captain Ray…
Les 8 détonations nous assourdissent quelques instants et, sidérées, nous voyons alors l’Oncle Tob se redresser, passer la main dans ses cheveux, épousseter sa veste d’un geste délicat puis rendre posément son flingue à l’Oncle Jelly et nous gratifier d’un grand sourire chaleureux, les bras écartés en grand :
« Alloooons… Allons, allons… Hé bien ! Mais qu’est ce que ça veut dire tout ça ???… Mes amis, mes très chers amis… Calmons-nous : restons zen ! Apprécions ces moments à leur juste valeur et faisons fi de nos petites rancœurs !… Qui a-t-il de plus beau, de plus apaisant et de plus chaleureux qu’une famille unie dans la paix et l’harmonie, dans la joie commune, huuummm ? » Interroge-t-il d’une voix emplie de chaleur et de bonhomie avant de continuer sur le même ton apaisant :
« Oubliez donc toutes vos petites querelles insignifiantes : nous sommes une famille ! Une famille unie, heureuse et aimante ! Solidaire ! Nous sommes là et nous seront toujours là les uns pour les autres, en toutes circonstances ! Sans à priori, jalousie ou autres petites mesquineries de ce genre ! Allons mes amis, mes très chers amis : oubliez tout ça et embrassons-nous ! Savourons et apprécions notre bonheur commun et allons fêter cette brave et chère vielle Tatie Felicia ! Humm ?… »

Anesthésiés par la scène que nous venons de vivre, nous nous sourions benoîtement avant de tomber dans les bras les uns des autres et de nous embrasser en de chaleureuses accolades réconciliatrices… Enfin presque, car j’entends Maman lancer à la Tante Telma :
« Sœurette ? »…
Elles m’empoignent alors chacune par une épaule et mes pieds touchent à peine le sol quand nous franchissons la double porte du bureau.
« Bon… ben, à la r’vouaillure ! » balance-je par-dessus mon épaule avec un rictus bien niais en traversant le vestibule et de vociférer en passant devant le sofa :
« Hééé ! Ma caquetttteeeeeeeuuuuuuuuu ! »
Tante Telma s’empare de mon couvre-chef et me le colle sur la tronche comme un vieux soufflé au fromage raté et tout écouaféré au fond du moule avant de me jeter littéralement dans l’ascenseur :
« Haann… !!! Mais c’est vraiment pas possible cette odeur ! » s’offusque-t-elle.
« A qui le dis-tu ! confirme maman en se ventilant avec sa main soignée, elle doit être ravie sa chérie… »
« Ca dépend, elles font peut-être ville à part… » Glousse ma tante tandis que je ronchonne derechef :
« M’en fous, j’eul dira à ma mamie, d’abord ! »
« Pardon ? » susurre maman,
« Nan, nan, j’disais : fait lourd ! Y va-t-y pas pleuvoir des fois ? »
Maman lâche un gros soupir en regardant d’abord sa sœur puis moi :
« Si : sûrement des beignes si tu continues à nous prendre pour des quiches ! »
Je décide donc de me renfrogner dans une attitude et un mutisme contestataires tout autant de bon aloi que de circonstances après cette remarque culinaire maltapropos…
Tante Telma continue nonchalamment :
« Tob est vraiment en super forme depuis qu’il s’est remarié avec cette journaliste… Bon sang chérie, je l’adore mais j’arrive jamais à retenir son prénom, j’ai honte… Pourtant je ne loupe aucun de ses reportages, je t’assure…»
« T’inquiètes pas, ça viendra ((je me demande ce que cette sentence de Maman veut dire…)), Kéziah… elle s’appelle Kéziah, c’est Hébreu… »
« Ha mais oui ! Qu’elle gourde : c’est vrai que Tob est Juif ! J’oublie tout le temps… Remarque bien que, quand on le voit, on ne le dirait pas… »
« Ben ouais, pôve tache collagènée, pense-je en mon for intérieur, c’est sûr qu’avec des frisottes et un schtreimel sur sa tête en permanence, depuis 30 ans qu’tu l’connais : tu zapperais pô !!! Pppfff… »
Deuxième sous-sol… Elles me poussent hors de l’ascenseur vers la bagnole de Tante Telma, une Mercédès Classe S 550 Cabriolet Vert Bouteille, cadeau de l’Oncle Paul -son mari- pour leur 35 ans de mariage. Comment qu’elle se la pète pas là dedans… C’est bien la mère de sa fille, tiens : les chiens font pas des chats !

Elles me collent sur le siège arrière sans un mot et s’assoient, Tante Telma au volant, et nous quittons le garage du One PP, après que Maman se soit retournée pour virer ma casquette d’un revers de la main et nous nous engageons sur Madison Street…
St James, Bowery, East Houston et enfin Lafayette Street pour atterrir sur Park Avenue… Moi ch’rais pô passée par là mais bon : si j’dis kekchose je sens bien ksavacore ête mal vu, alors… Je me laisse donc bercer par le soleil sans entendre un seul mot de ce que les deux frangines se racontent, mais ça doit être sûrement très drôle vu les rires sporadiques qui fusent de temps à autres ; tout comme fusent aussi les coups d’œil sur mon auguste personne…Des fois que je saute en marche, hein ?…
Et c’est aux feux de la 34ème Rue que se produit l’impensable, à moins qu’il ne s’agisse d’un effet TRES secondaire du truc bizarre qu’on a bu avec les potos à Aracati…
Alors que nous attendons, derrière une bonne trentaine de voitures alignées sur 5 files, que le feu passe au vert, un autre des innombrables taxis jaunes qui sillonnent New York et qui nous entourent vient stopper près de nous. Maman tourne nonchalamment la tête et… La vitre arrière du Yellow Cab s’abaisse, un très joli visage féminin avec un sourire radieux apparait et lance un :

« Yooouuuhhhooouuu, les filles ! ».
Tante Telma se retourne aussi et lance de concert avec Maman :
« Heeeyyy, chérie !!! Ca va ? ».
« Super, oui ! Un peu à la bourre mais ça va aller : mon avion ne décolle que dans deux heures… Et vous ? »
Maman secoue les mains :
« A la bourre aussi, mais on va y arriver… Tu n’oublies pas qu’on déjeune ensemble Mercredi, hein ? »
La jolie jeune femme au moment où le flot de la circulation repart envoie un kiss de la main et lance :
« Comme d’hab ! Vous inquiétez pas les filles : je serai là ! Plein de poutoouuxx… »
Le taxi se perd dans la multitude des véhicules et je reste totalement éberluée : c’est pas possib’ !!!!! Nan, nan : c’est PAS possib’ ! Nan, nan, nan : ça pouvait pô être Ayiki ! Nan, nan… C’est pô, possib’ ! Nan, nan, nan, nan…
J’entends alors -ou je crois entendre- Tante Telma demander à Maman :
« Elle vient toujours acheter son Maroilles chez Vandekerckhove ? »
« Oui, deux fois par mois tu sais bien… Elle est trop fun, la puce… »
Nan !!! Nan, nan, nan, nan, nan : c’est pas possib’ !!! Ca j’en suis sure !!! Nan, nan, nan… Nan !!!
NAN !!!!!
Faudra que j’en cause kaméme à Paupiette et Lémonette mais elles vont penser que j’hallucine…
Et en fait d’hallucinations, ce que je ne pouvais pas savoir en traversant la moitié de New York, c’est que mes deux copines elles, baignaient dans un rêve…
To be à suivre…
(1) OCCB : Organized Crime Control Bureau. Bureau de Contrôle du Crime Organisé, Office du NYPD de la Lutte Anti Mafia(s)
(2) Maryse Bastié : née Marie-Louise Bombec, aviatrice Française, née le 27 Février 1898, à Limoges, morte le 6 Juillet 1952 à Bron. Elle fut la première aviatrice française à accrocher de nombreux records à son palmarès. Ses exploits furent très rapidement médiatisés. Nombre d’établissements scolaires, théâtres, rues et avenues portent aujourd’hui son nom.
(3) « Pinces » : argot policier pour « menottes » parfois appelées aussi « cadénes ».