
Mise au point -3-
Réconforté par une bonne rasade d’un vieux Calva salvateur tout droit sorti de la gourde dont Calvados ne se sépare jamais, l’Abbé et ce dernier rejoignent la troupe des vaillants Tichaventuriers et des habitants des Bellon, tous s’esbaudissant et ricanant en faisant cercle autour d’un Lambert tout penaud avec sa planchette collée au popotin, chacun y allant de son commentaire plus ou moins comique ou scientifique…
C’est alors que, dans la douceur printanière d’un soleil cuivré caressant de ses doux rayons couchants les blés mordorés ondulant sous la bise, une voix douce et mélodieuse sonna dans le crépuscule tels les chants des Sirènes Leucosie, Ligie et Parthénope charmant Ulysse (NdlR : bon ça c’était pour la licence poétique, hein, pask en réalité ça tenait plus du croisement entre l’éructation d’une poissonnière des halles et la corne de brume du Titanic le jour de son naufrage. Bref…)
« A TAAAAAAAAAAABLE !!!!!!!!! »
Calvados Lendive : Ah ! bonne nouvelle ça ! Voilà, voilààààà ! On arrive ! Allez les vieux gars : Hop ! Hop ! Hop ! Hop !
(Tout le monde se rue alors sur les tables au nappes en Vichy et s’installe)
L’Abbé (revigoré frotte ses papattes) : Haaaaaa !! Du chou farci : mon plat préféré !!!!!
Calvados : Et tournée de beaujolpif !!!!!!!
Henry : J’fais péter les rouilles !!!
Clouc ! Clouc ! Clouc ! (bruit des bouchons)
Alex : Z’allez m’en dire des nouvelles : l’chou farci, c’est sa spécialité à bobonne !
Henry : Habahoui j’vois ça : il est meilleur qu’le mien ! J’suis jaloux ! Madame Alex, va falloir qu’on cause…
Abel (toujours avec le moutard sur ses genoux): Habahoué, sans vouloir te vesker Henry, y a un p’tit je ne sais quoi…
Henry : Oui oui jeul sens bien aussi…
Madame Alex : J’vous donnerai ma recette, m’sieur Henry ! Mais vous donnerez celle de vot’ gigot, par contre : parait que c’est une merveille…
Henry : Bah voilà : on échange !
Nicéphore : Habah surtout qu’y désamorce pas les flageolets le Henry !!! (éclate de rire et se prend un grand coup de coude l’abbé mais rigolade générale quand même)
(Puis les grands arrivent et ça chante, ça musique, ça danse, ça rigole et ça picole, of course…)
L’Abbé (se penche vers Calvados et chuchote) : Tu penses à ske ch’t’ai dit pour la r’morque et grand papy ? Pask à mon avis, ça s’rait bien d’profiter de la fête : personne te r’marquera…
Calvados : Oui, oui, bonne idée : je vais y aller avant la comparaison de calva. Paskeu après, hein…
Le Chef : Alors m’sieur l’aumônier : on fait des « messes basses » !!! hihihihihihihihi Mais ça vaut toujours mieux que des masses besses !!!! hihihihihihihi MAC BETH !!! Elle est hipch bonne hein ???
Calvados : Chef, t’es bourré !
Justin Cassoulet : Comme aurait dit Shakesseupireu.
Calvados : On dit chakèspéare
Le Chef : Méééé hipch ! Burps ! da futou !!!
Justin : Chez nous, con, on dit Shakesseupireu, Môssieur Calvados !!!
Calvados : Habah ok, j’critique pas, si c’est régional, hein…
(Grands et Tichats continuent de chanter, baffrer, picoler et danser)
L’Abbé : Pssssttt.. pssssttt… Calvados…
Calvados : Oui oui, j’y vais ! Vous v’nez ?
L’Abbé : J’te suis pis j’frai l’pet pendant qu’tu s’ras »là-bas ».
L’Abbé suit en surveillant les alentours discrètement, sa batte de base-ball favorite en pogne, tandis que notre ami Calvados Lendive plonge dans l’holographique bibliothèque et se retrouve téléporté dans la véritable Grande Bibliothèque Académique de Lingua Franca. Après en avoir descendu le célèbre grand escalier, il s’avance au cœur des livres séculaires vers la chambrette de Grand Papy Tichat, habillement aménagée dans le célèbre et ancestral bureau du Conservateur, le non moins célèbre Alain Delco.
Calvados : Brrmmmm.. Brrmmm brmmm brmmm.. Kofff kofff kofff… Heuuu salut Grand Papy, ça va bien ?
(Ronflements TRÈS forts. Environ 5-6 sur l’échelle de Richter))
Calvados : Ha la vache !Y va m’coller la marque qui sonne à tout faire trembler comme ça ! WHHHOOOOO !!! GRAND PAPYYYYYYYYYYYYYYYY !!!!!!
Grand Papy Tichat : Gniiiiiiiiiiii ? Gneugneusséé ? Quoi ? Hein ? Kissa ? Sépamoijétépalà !
Calvados : C’est moi ! On a des questions, mais pas beaucoup d’temps !
Grand Papy Tichat cherche ses bésicles, les ajuste puis allume sa bougie : Gneugneussé ? Hein ? Haaaaaa, mais c’est toi ??? Kik tu fous là ???? Tu sait-y l’heure qu’il est au moins, hein ????
Calvados : Bah oui : la même heure ici qu’là-bas, hein !
Grand Papy : Ouais, ben justement : c’est l’heure où que j’ronque, MOI !!!
Calvados : Bah nous aussi, alors on va tâcher d’faire fissa !
Grand Papy : Houlalaaaa, malheureux !!! Bon, ata : j’allume l’électricité pis j’éteins ma bougie, c’est plus prudent… Bon : qui qu’y t’arrive, mon gars ? (baille)
Calvados : On a un demi souci : Ton pote le boussolier a utilisé une des machines de l’ingé et bien sûr ça a pété ! Bon, jusque-là : rien d’anormal… Seulement maint’nant, l’ingé il est »boignétique » ! S’t’à dire qu’il attire le bois, quoi, comme un aimant… Ça t’dit kék chose ça, Grand Papy ?
Grand Papy passe la papatte sous sa bonnette et se gratte la tête, pensif : Ata, mon gars ! Aaaaata : laisse-moi réflékir gentiment…
Calvados : Heuuu, si ch’peux m’permettre, on a un tantinet l’feu au cul, tu vois : chuis attendu pour un comparatif de calva, et ça…
Grand Papy : Habahoué j’comprends, mon petit… J’comprends… Mais, une chose que tu dois savoir, c’est que lorsque tu utilises ce « couloir », le temps, là d’où tu es parti, reste le temps « T » ! Et, lorsque tu r’viendras, ce s’ra comme si t’étais jamais parti en fait, à peine kékeu s’condes… Bon sûr mais c’est bien sang : LE CALVA !!! C’est ça l’remède !!! Y faut l’laver au calva ! Y va couiner passkeu ça pique un peu, mais d’façon y a pas b’soin d’en mette beaucoup, alors…
Calvados : Habah super ! Merci Grand Papy ! Je r’pars là-bas illico ! Surtout tu fais un gros bisous aux Grandes et à Bizounours, hein. Pis dis-leur que tout va bien et qu’on leur raconte tout en rentrant.
Grand Papy : Heuuu, t’es sûr qu’t’oublies rien ? Vraiment, rien ?
Calvados : Heuuu nan, j’vois pas quoi Grand Papy… Ah si ! Chuis bête : pourquoi ça a pété leur truc là, et comment y vont faire pour tracer la route ?
Grand Papy : Calvados, t’es pas bête… Alors, réfléchis 1 minute : à ton avis, pourquoi ces deux appareils ont pété EN MÊME TEMPS ???
Calvados : Baheuuuu… Interaction magnétique ?
Grand Papy Tichat : Vouaaaaalààà !!!
Calvados : Bon, bah du coup, ça s’ra fromage ET dessert, et pour tracer la route ça va être plus simple.
Grand Papy, doctoral : Ne JAMAIS -et je dis bien JAMAIS- utiliser la Pierre Magique près d’un appareil utilisant une quelconque source magnétique OU électrique sans être à plus de 100 pas… mmm… disons 101 pas, même, c’est mieux.
Calvados : Bon, ben on va faire comme ça. Du coup je file : le devoir m’appelle -à charbon- faut comparer les calvas !
Grand Papy : Ah et aussi, pour tracer la route, c’est TRÈS simple : dis simplement à ces deux agités du bocal « tracez-nous une route » et non pas « faites le point » ! Pask sinon vous allez jamais vous en sortir… C’est bon : t’as tout bien compris et ret’nu cette fois ?
Calvados : Oui, oui : tout bien compris Grand Papy ! Et tout bien dans la caboche. Gros boujoux mon Papy, bonne nuit et à la prochaine !
Grand Papy : Oui, oui : bonne nuit, bonne nuit ! Et pis faites un effort aussi, hein… Bon, ben moi j’retourne me bâcher en attadant…
Grand Papy éteint alors toutes les lumières à l’instant où Calvados pose le pied sur la première marche tout en haut du grand escalier…
L’Abbé : Habah ça a été rapide dis donc ! Mais c’est quoi s’cocard ??? Grand Papy t’a tapé ????
Calvados : Nan ! Mais s’con-là il a éteint la lumière juste au moment où j’allais descendre ! Du coup j’m’ai cassé la gueule en loupant une marche !
L’Abbé : Ha ! Et… C’était pas la première en partant du haut d’l’escalier, par hasard ?
Calvados : Si ! Comment t’as d’viné ? Par contre j’ai pas loupé la grosse pile de bouquins qu’était à côté !
L’Abbé : Aie aie ouccchhh !
Calvados : Bah oui… Bon, j’attrape une bouteille comme alibi et on y r’tourne !
L’Abbé : Oui, mais ata : bois donc une bonne rasade de ça : dans 2 minutes il y paraîtra plus rien !
L’abbé sort alors une bouteille du célèbre Arnica du Père François et en verse une bonne goulée dans la bouche de Calvados.
Calvados : Glou, glou, glou… Burpch ! Marchi !… Et pour l’ingénieur : faut l’laver au calva pour l’éteindre et décoller le bois. C’est une question d’charge temporelle, j’vous esplikerai…
L’Abbé : Bah, vu s’qu’y s’enfile depuis tataleur, y doit être déjà bien récuré d’l’intérieur !!!! (ricane fortement)
Calvados : Bon : retournez-y ! J’viens dans trois minutes. Si on arrive ensemble y vont s’douter d’un truc…
L’Abbé retourne alors vers la fête par un chemin opposé à celui de Calvados tandis que ce dernier, »décocardisé », vient s’asseoir près d’Alex.
Calvados : Bon, mon copain Alex : on s’la fait cette comparaison d’calvas ?
Le lendemain matin l’Abbé, premier levé, arpente le dortoir, tête dans l’cul, mains dans les poches, béret à l’envers, vareuse mal boutonnée, et un mégot éteint au coin des lèvres en marmonnant »j’aurais jamais cru qu’on pouvait boire autant ! Et pourtant, j’ai une certaine expérience… »
Calvados : (chuchote) Salut L’abbé, ava ? Pas trop abîmé ?
L’Abbé : Pas si fooorrt !!! Mais pas si fort, seuteuplé !!!
Calvados : Habah oui mais l’calva, quand t’es né d’dans : ça va. Pask sinon : ça tape, hein…
L’Abbé : Parle pô d’calva, seuteuplé.
Calvados : Bon, on va réveiller les autres : faut kaméme s’mettre en route…
L’Abbé : Tiens, on dirait la godasse du chef ça, nan ? Doit y avoir un chef au bout logiquement…
Abel se réveille en pleine forme, le boud’chou toujours avec lui, et ils rigolent tous les deux en regardant autour d’eux.
Boud’chou : Tu vois qu’la limonade fé eftra ! Hein ?
Abel Gingle : Oui, mais ça fait roter ! (et ils rigolent)
L’Abbé secoue la godasse du chef…
La Chef : Hihihihihihi rooooooooonnnnnnnnnffffffffflllllll…
Calvados Lendive : Bon l’abbé, je vous laisse faire, je vais au plus urgent.
L’Abbé : Tu vas faire popo ?
Calvados Lendive : Naaaannn pppppppffffffffffff ! J’vais mettre en route les deux moules à gaufre là.
L’Abbé fout un coup de saton dans une godasse au hasard.
Justin se redresse droit comme un « i » : Quartier-Maître Fusilier Justin Cassoulet, con ! Au rapport, Chef !
Calvados trouve l’ingénieur et le boussolier l’un à côté de l’autre, ronflant comme des moulins : Allez, hop ! Debout lanedans ! Faut nous calculer la route ! Et pas d’rigolade avec les machines, hein : TOUT avec la boussole s’te fois-ci ! d’façon, la machine elle est pétée, alors…
Lambert : Gniiiiiiiiiiii ?
Calvados : Oh putain Justin : t’as l’air propre tiens…
Agénor Ossud : J’allais l’dire….
Justin : Heing, con ? Et pis crie pô si fort !! J’ai comme une espèce de Pic Vert dans la tête !
Calvados: Lambert, Agénor… Si vous calculez pas la BONNE route de suite : je passe un disque de musique concrète a fond, ok ? Et si ça suffit pas : Grand Corps malade ! Namého !
Henry braillant comme un putois : AU JUS LA D’DANS !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Calvados : Habah tiens, bonne idée ça ! Ça va faire du bien !
Alex et tous les Tichats de la ferme sortent pour le café et tout le monde se rue vers les grandes tables. Et, 22 lires de kawa salvateur plus tard…
Agénor : Ça y est : la route est tracée !
Calvados : Oh ?! Si vite ?
Le Chef : Tracée, tracée… Faut kaméme voir, hein… Pis vérifier, surtout !
Lambert : Bah oui, on a juste mis un coup de stylo sur la route qu’est dessinée sur la carte : y a pas besoin d’faire plus vu qu’elle existe déjà !
Alex jette un œil : Bah oui : c’est bien la bonne route…
Arthur : Chaipô pourquoi, mais -scusez moi m’sieur l’Abbé, hein- mais là, cette fois, c’est moi qu’a une furieuse envie d’taper sur kékchose, ou plutôt sur keukun !
Le Chef : Heuuu… Et alors -mais arrêtez moi si j’me trompe, hein- si j’compte bien, ça fait DEUX jours que vous nous berlurez avec vos « mises au point », c’est bien ça ?
Agénor : Nan nan nan nan nan ! Pask d’puis deux jours, ben on n’avait pas de route, alors on f’sait au jugé ! Mais là, aujourd’hui, LA route elle part de la ferme ! Alors, forcément, c’est beaucoup plus facile, hein…
Le Chef : Dis Henry, t’aurais pas une TRÈS grosse louche à m’passer seuteuplé… Mais vraiment une TRÈS GROSSE !
Agénor : Pis en plus vous nous avez d’mandé d’faire « le point » donc, forcément, hein…
Henry : Bah nan, c’est pas pour les défendre hein, mais force est de constater qu’ils ont raison ces couillons-là.
Sylvain : Vindediousse de pétard de canard !!! Quoiqu’là, connard s’rait bien plus approprié : quand on vous d’mande de faire »le point », c’est pour savoir »où on est », certes, mais c’est surtout pour savoir OU ON VA !!!
Agénor : Nan nan nan nan nan ! On fait l’point pour savoir où on est et pis c’est tout ! Après, pour savoir où on va : on trace une route, c’est pô pareil ! On peut faire l’point tout seul, mais on peut pas tracer de route sans faire le point : c’est comme ça et pis c’est tout ! C’est scien-ti-fik !!!
Le Chef, à bout de nerfs, se met alors à courir après Lambert avec une grosse louche, suivi par Arthur tout aussi énervé que le Chef et qui course Agénor avec une batte, et d’un Sylvain enragé qui fait tournoyer une louche ET une batte !
Alex : Habah les gars, faudra rev’nir plus souvent : avec vous on s’ennuie jamais !
La rigolade générale est alors interrompue par de sonores »CHHHBBBOOONNNGGG » et »CHHHPPPAAAFFF »…
L’Abbé : Ha… Louche du Chef = UN ! Lambert = Zéro !!!

Après une bonne distribution d’Arnica du Père François, nos vaillants héros sont enfin prêts à reprendre la route de leurs palpitantes aventures. Et après des »au revoir » pleins d’émotion et force promesses de se revoir très vite (Promesses humidifiées par une petite larme d’Abel qui laissait-là son désormais très cher Boud’chou devenu son filleul mais que ça s’rait trop long à vous raconter et qu’on aurait encore des emm… remarques déplaisantes de la Rédac’Chef ! Alors, hein : on vous laisse imaginer et pis basta !), tout le monde monte en voiture et au commandement les moteurs prennent la parole pour emmener toute la troupe vers de nouvelles et imprévisibles péripéties.
Justin Cassoulet : (murmure à Agénor) Oki : tu restes en tête ! Mais si tu nous r’fous d’dans, maquarel, j’te r’fais l’portrait comme le cul d’Guéguette, vu ? Et souris : on nous r’garde !
(Pétarade, bruit de ch’nilles, poussière, »Hourra ! Bravo ! A bientôt » etc, grands mouchoirs à carreaux qui s’agitent dans le vent)