Mise au point -1-


Laissons donc notre ami Bizounours et Roxanne au chaud près du feu sous le dolmen.

Après un sommeil réparateur suite aux événements turlusiphonnesques, nous retrouvons nos vaillants héros (kof kof kof kof kooof) autour des voitures et fins prêts à reprendre la route et l’aventure.

Le Chef (Pensif et étudiant la carte) :  »Bon, les gars : on a trente-et-une bornes jusqu’à Hainsy-Gransoleil… Si on s’démerde bien, et si on tient la moyenne, comme dit Calvados, on devrait y être pour la fin de l’aprém… Par contre, faites gaffe : y a pas mal de virages, faudra pas qu’on s’colle trop au cul.

Calvados : Bon, bah on avance alors, on va bien y arriver, non ? Par contre, 31 bornes c’est pas par la Nationale, nous on va plutôt prendre les touuuutes petites routes hein, pô envie de m’faire emerdouiller par un camion de grands !

Le Chef : Oui oui, on est bien d’accord ! Faut éviter les routes des grands ! En plus, vu qu’y roulent comme des fondus, y s’raient bien capabes de pô nous voir et pis ça finirait mal…

Calvados : Ha oui, très juste, ça ! Bon Agénor, tu passes devant et tout l’convoi t’suit.

Agénor : Compris : ça marche ! Si y a un pépin : je stoppe et je klassonne !

Justin : Ouais, bah commence déjà par démarrer ! Tu klassonneras plus tard…

L’Abbé : Et qui ferme la marche, du coup ?

Calvados : Ha bah, c’est la poule qui chante qui fait l’œuf ! Du coup : c’est vous l’Abbé ! Hihihihihih…

L’Abbé (CHPLAF ! Derrière la tête de Calvados) : Tu crois qu’sa m’fait peur, morpion ? J’tais Adjudant-Aumônier au 2ème RET*, moi !!! ‘fait la guerre, moi !

Calvados : Mais aiiieuuuuuuu !!! J’ai jamais dit ça ! J’ai juste dit que, puisque que vous d’mandez, vous y allez pis c’est tout ! Pis ça évite de passer trois plombes à décider, en plus !

L’Abbé : Mouais, bon… Vu comme ça…

Abel : Moi, j’vais m’mettre en milieu de convoi, c’est mieux…

Calvados : Bah en fait, si Agénor est d’vant et l’Abbé derrière, alors oui : c’est mieux si tu t’mets entre eux deux ! *chuchotis* Rhalalalalala ! On est pô aidés tous les jours, hein…

Justin : Bon zyva, con ! Je m’mets derrière toi Agénor…

Le Chef : Tout l’monde embarque !

Sylvain : On est pô en bateaux : on est en ouatures !

Le Chef : A mon commandement ! Démarrez !

(Pétarade et bruit des moulins)

Calvados : Heuuu… Dis, Chef : si tu montais dans ta bagnole, au lieu de dire des conneries ?

Le Chef : Ha oui, merde ! Pardon ! M’semblait bien qui m’manquait un truc, aussi… (embarque aussi et démarre).

(Le convoi se met en marche et quitte l’herbage pour un petit chemin en pierres le long d’un talus… Pétarade, bruit des moteurs et cliquetis des chenilles. Vague son de chants divers et variés couverts par le bruit des moulins)

Calvados (Dans le talkie-walkie) : Bon, bah ça commence bien, la route est jolie, faut juste faire gaffe…

Abel : Reçu ! Surtout aux voleurs de goûter. Restez vigilants les copains !

(Le convoi arrive au cœur de la forêt après 4 bons kilomètres de route)

Justin (Dans le talkie) : Waaahooo ! Putain de con de maquarel !!! Zavez vus ces putain d’arbres ????

L’Abbé (Dans le talkie) : Si tu continues à dire des gros mots comme ça, j’te rattrape moi !

Calvados : Ouais, bah nan l’Abbé : vous restez en queue de colonne !

Justin : Nan nan, ça va M’sieur l’Abbé ! Ça m’a échappé ! J’frai plus, promis-juré-craché et tout et tout !

Calvados : T’es sûr de la route, Agénor ?

Agénor : Oui oui, toujours en tête… (kkrrllr frrtchhh ziiii) Faites kaméme gaffe ça tournouille pas mal kaméme, mais ça passe…

Abel : (Petite voix dans le talkie-walkie) : Dites les gars, c’est de plus en plus sombre et ya des gros cailloux, chuis pô trop rassuré, moi.

Justin : Ben appelle Tichassurance! (éclate de rire)

Calvados : Toute façon, on a pô le choix : y a des rochers à droite et la rivière à gauche ! On peut pas faire autrement que d’continuer !

Agénor : STOOOOPPPP !!!! Y a un blème les vieux gars !

Calvados : Habah, c’était top beau… Kikispasse ?

Abel (Déglutit dans l’talkie : Des… des voleurs de… (glups) goûter ?

(Tout le monde descend de voiture et se regroupe autour d’Agénor)

Le Chef (Arrive en courant) : M’en doutais ! M’en doutais, nom d’un Bizounours !!!

Calvados : On se calme, Chef : on va voir… Bon, kikispasse ? Kikitarrive ?

Agénor : Ben. Agardez, les vieux gars : ça correspond pas à la carte, pis les panneaux y disent nawak !

Calvados : Euh, dis-moi Agénor : on va bien vers Lamotte-Beuvron là, on est bien d’accord ?

Agénor : Ben oui, on va pas vers Rangoon !

Calvados : Alors, tu peux m’expliquer POURQUOI les deux plus grandes villes sur ta carte c’est Milan et Turin ??? Mmmmm ???

Agénor : Kissé qui m’a mélangé mes cartes ???

Calvados : Bon, Agénor : on ne panique pas ! On va prendre la bonne carte et on va chercher où on est… (voix dangereusement calme).

Justin : Habah justement : kékun qu’aurait les résultats du Milan AC / Turin, au fait ? C’est pour mon Loto Sportif.

(Abbé CHBAFFE Justin !)

Justin : Mmééaaïïeeeuu !!!

Calvados : *chuchotis* Habah tu l’as pas volée celle-là !

Justin : *chuchotis* Fayot !

Le Chef : Dites, ça s’rait bien de rester zen et de tout reprendre depuis l’début, nan ? Agénor, sors nous ton matériel et fais le point.

Calvados : *chuchotis* Oh, putain ! T’as entendu comme moi ? Le chef qui s’comporte enfin correctement !

Justin : *chuchotis* Oui ! Encore quelques coups d’tonnerre et des baffes de l’Abbé et y va d’venir normal.

(Agénor sort ses cartes, son compas, sa boussole, son Trigonométreur Pendulaire A Impulsions Sustentatoires, son sextant, son pendule et LA pierre Magique de Grand Papy Tichat)

Agénor : Et valààà !

Calvados : Bon, pour l’sextant, on oublie : on est au milieu des arbres et on voit pas le ciel, du coup, ça limite un peu. Et l’reste, j’sais pas m’en servir, alors.

Nicéphore : Attaaaadez les gars, bougez pô : ch’fais une photo de groupe !

(Gros éclair du flash ! Sont tous complètement éblouis ! Se frottent les mirettes quand soudain on entend Abel hurler)

Abel : ALEEERTE !!! LES VOLEURS DE GOUTER !!!!

Justin : L’est maboule de gueuler comme ça, lui !!!

Calvados : Justin, viens ! On va voir ce qu’il a.

(Nos deux amis trouvent Abel tout blanc, tout tremblant, et qui montre un truc du doigt…)

Justin : Ben… kikiya mon Abel ???

Arthur : Oh ! Bah t’as l’air tout chose, mon copain…

Calvados : Argade donc, vieux gars : un panneau avec « Territoire des voleurs de goûter » écrit d’sus !

L’Abbé : Sainte Vierge !!!! (se signe)

Justin (Sortant son 1873) : Aux flingots les vieux gars !

Calvados (gueule comme un putois qui aurait senti sa propre odeur) : Zavez pas d’otes conneries à faire, nan ? On n’est pas assez dans la merde comme ca, nan ? L’panneau y sent encore l’feutre !!! C’est kékun qui vient de l’faire pour foute la trouille à s’pôve Abel!!! Bande de salopiauds !!!

(Sylvain se roule par terre en se tenant les côtes)

Calvados : *chuchotis* Oooh putain, y va rien prendre !!!!

L’Abbé (Regard d’Obusier de 155 mm) : Oooh. Mais c’est TRES drôle ça ! Vraiment TREEES drôle, ça… Si si si… (Chope Sylvain par la peau du cou et l’amène derrière un gros buisson)

Sylvain : Mééééééééééééééééééé !

L’Abbé (Chante pour couvrir les bruits des gnons, des châtaignes et des mandales, ainsi que des « aie » et des  »ouille  ») : GLORIAA !!!! GLORIAA IN EXCELSIS DEEEEOO !!!!

Justin (Passe sa patoune fraternellement autour des épaules d’Abel) : Tiens, mon cadet ! Bois un coup : ava aller mieux !!! (verse une bonne rasade de vieil Armagnac dans le gosier d’Abel)

Sylvain (de retour) : Efkuve-moi Abel, f’étais vufte pour rigoler. V’le f’rai flus, f’te fromets !

Calvados : Bon, on peut p’téte s’remettre au boulot, oui ?

Le Chef  : Ben… J’voudrais pas avoir l’air d’vous presser mais, hein,

Calvados : Oui, autant sortir d’la forêt avant la nuit.

L’Abbé : *chuchotis* Henry ! Passe-moi l’Arnica seuteuplé : m’suis fait mal aux papattes

Sylvain : *chuchotis* Pis fi y a du rab : fuis freneur auffi, hein…

Philistère : Oui. Pis surtout qu’il est déjà 10 plombes du mat’… J’dis ça, moi, hein…

Le Chef : Dites, Philistère a pas tort : c’est bien beau la rigolade, mais faudrait ptéte qu’on s’sorte le cul des ronces ! Au sens propre comme au figuré, d’ailleurs.

Agénor (Interrompant ce petit échange) : Ça y est : j’ai trouvé !

Justin : Habah kamême !!! Et ?…

Calvados : Alors, tu sais où on est ?!

Agénor : Habah nan ! Faut pô rêver non plus, hein. J’ai pô dit que j’savais OU qu’on est : j’ai dit que j’savais qu’on est perdus ! Nuance, hein.

Calvados (Dépité): Mouais. M’enfin, c’est d’jà ça.

Agénor : Alors, si mes calculs sont exacts. On est exactement. LA ! (pointe une papatte décidée et affirmative vers le sol)

Le Chef (Dubitatif) Et c’est censé être  »OU », ce « LA » ? Je-te-vous-prie-je-tu-seuteuplé ? Mmmmm ?

Agénor : Ben… LA ! Agarde la carte : juste ICI !

Adrien : Faudrait savoir à la fin : c’est LA ou ICI, du coup ?

Calvados : *chuchotis* Aie aie aie aie aie… Bon, tu sais OU on est sur la carte ?

Agénor : Ben : ICI, quoi ! (désigne un point sur la carte) J’viens d’le dire ! Pile-poil entre Hainsy-Gransoleil et Renzy-La-Monnaie ! Mais alors : exactement pile-poil !!!

Calvados : Habah voilà : enfin un truc sérieux ! Et donc : on va dans quelle direction ?

Justin : *chuchotis* Sérieux… sérieux…

L’Abbé : Ben, vu que Hainsy-Gransoleil : on en vient, J’vois pas trop s’qu’on r’tourn’rait y foute. Donc, Môssieur Calvados : on va où, du coup ? Mmmmm ? *chuchotis* Ah y a des vedettes, hein !!!

Calvados : Heuuu… T’en voudrais pas une toi, par hasard ?

L’Abbé (Les yeux plissés) : Chiche !

Justin : *chuchotis* Joue pô mon cadet !!! Joue surtout pô !

Calvados : Et PAF ! L’Abbé.

Justin : *chuchotis* Oh, le con !!!

Calvados : Habah krotard ! C’est con, mais ça fait du bien.

(L’Abbé saute sur Calvados et y colle une tannée d’anthologie ! Doivent se mette à 4 pour le stopper)

Le Chef (Poings serrés-coudes-au-corps en sautant comme un cabri et en tapant des deux papattes sur le sol) : C’EST PAS BIENTOT FINI NON ???!!!

Calvados : M’en fous, (crache) fa fait tu bien kaméme ! (crache)

Le Chef : AARRGGHH !!! (Tape et saute de plus belle!!!)

Calvados : Kikila à argher l’Chef ?

Le Chef (chope Agénor par le col et le secoue comme un prunier) : Tu vaty nous dire comment qu’on sort du merdier dans l’quel tu nous as collé, ô imbécile ???

Lambert : Atadez ! Aaaatadez ! Calmons-nous ! Caaaaalmons-nous ! Tous !

Henry : Oui, Lambert a raison : buvons un verre réconciliatoire !

Calvados : Heuuu… Vous préférez pas sortir d’la forêt avant ? Pask y a au moins une bonne heure de route, mine de rien…

Le Chef : NAN !!! On remont’ra dans les charrettes quand on saura où qu’on est, comment qu’on en sort, où qu’on va et comment qu’on y va ! Na !

Calvados : Bah, Agénor l’a dit ! Et pour en sortir, d’après la carte, on suit l’chemin pendant une heure à peu près, et…

Henry (Rince tout le monde avec une vieille Liqueur de Myrte de sa Corse natale) : Allez, allez !! À la fraternité et aux coudes soudés les vieux gars !!! et levés aussi ! (éclate de rire)

Calvados : Ouaip ! Et dès qu’on est dehors : on s’arrête pour casser la croûte ! Pask ça commence à faire faim.

L’Abbé) : Aaaaaaaaaaaaah ! Bonne idée ça ! (Embrasse Calvados) S’cuse-moi hein, c’étaient les nerfs !

Calvados : Bah, moi aussi l’Abbé !

(Le deux se reboujoutent bien fraternellement)

Calvados : Bon, ben, du coup : TOUT LE MONDE EN VOITURE !!!

Le Chef : EN VOITUUREE !!!

Agénor (Toujours en tête) : ET EN AVANT !!!

(Pétarade, bruit des moulins et cliquetis des ch’nilles, mais vous êtes habitués depuis le temps, nan ?)

(Le convoi des P17  »Kégresse » avancent fièrement et en bon ordre le long de la rivière  »Paille », c’est son nom…)

Calvados (Au talkie) : Z’avez vu les gars : y a un pont sur la rivière ! On dirait qu’il a été dynamité

Abel : C’est p’téte un coup des vol…

L’Abbé : Tu vas t’taire, oui ?

(Le convoi continue de rouler sur l’étroit sentier au milieu des arbres séculaires)

Calvados (Toujours au talkie) : Oh ! Agardez : un moulin à aube ! Ça m’rappelle un truc, mais j’sais plus quoi.

Justin : Oui, ça m’rappelle certains crépuscules. (ricane)

Calvados : Y a une pancarte sur l’moulin Atadez… Y a écrit « Chez Crouzy »…

L’Abbé : Crouzy… Crouzy… M’rappelle kekchose aussi… Me d’mande si c’était pas une marque de farine de moutarde…

Calvados : R’gardez les vieux gars : on arrive enfin à la fin de la forêt !

Agénor : On y est, les copains ! Y a même une belle clairière en bordure du bois. On va pouvoir s’garer pis faire le point !

Nicéphore : Pis casser la graine, aussi !

Calvados : Oui, Henry m’a dit qu’y a des endives au menu !

L’Abbé : Gratinées au jambon ????

Calvados : Habah oui, l’Abbé, y a pas d’autre façon d’les faire.

L’Abbé : Miaaammmm ! Mon plat préféré !!!!

(Le convoi s’arrête et se gare)

Calvados : Bon, on descend des voitures et on monte les tables !

Le Chef : Oui. Pis on casse la croûte et on fait l’point !

Henry : Ça roule ! J’sers l’apéro le temps de faire réchauffer.

Nicéphore : Bougez-pas, les copains : j’fais une photo d’groupe ! (FFLLAASSHH !!!)

Calvados (se frotte les neuilles): ‘tain, mais il arrête pas lui ! Et ça y est : on voit des pamplemousses partout !

Arthur : T’es vraiment obligé d’mette ton flash en plein jour ?

Nicéphore : Oui, ça rend mieux pis ça fait de jolis effets.

Calvados : T’en foutrais des effets, moi.

(L’équipée sauvage s’installe autour de la grande table)

Le Chef : Bon, déjà si on était à mi-chemin ça s’rait pas mal, hein.

Calvados : On fait le point après manger ? Tu crois qu’c’est bien prudent ça, Chef ? Ça s’rait-y pas mieux de l’faire maintenant ?

Le Chef : Oui, r’marque… Maint’nant qu’t’en causes. Sors tes instruments, Agénor ! En plus, ça nous empêche pas de boire un coup.

(Agénor déploie et installe tout son matoss)

Agénor : Par contre faut qu’Lambert m’donne un coup d’patte pour le Trigonométreur, vu que c’est lui l’ingénieur.

(Les deux dégourdis s’activent alors autour du machin)

Calvados : *chuchotis* Aïe aïe aïe.

(Les deux compères font le point, règlent la bécane, rerèglent, notent plein de chiffres, font des calculs, tracent des traits avec un air grave et pensif…)

Le Chef : Glou glou glou… C’est kaméme beau, la techkeunique…

Calvados (Dubitatif) : Mouaif, m’étonnerait kaméme qu’à moitié qu’y nous pô disent qu’on est en plein milieu d’l’Afrique.

(Nos deux spécialistes posent alors délicatement la Pierre Magique de Grand Papy Tichat. Agénor met son pendule au-dessus et donne des indications à Lambert qui pointe l’horizon dans le sextant puis corrige le Trigono)

L’Abbé : Glou glou glou. Très beau, même.

(Agénor et Lambert reviennent, pas un peu fiers vers le groupe avec des feuilles toutes griffonnées)

Calvados : Alors ? Glou.

Agénor : Ayé ! On est  »ICI » !!!

Adrien : Habah on progresse, pask tataleur on était  »LA »

Le Chef : Heuuu… Tu permets que j’vérifie, sans te vexer.

(Le Chef étudie les papiers, calcule à son tour et recalcule, puis se redresse avec un large sourire)

Le Chef : Bien ! Bien, bien, bien ! Alors, selon vos calculs, Messieurs, nous nous trouvons EXACTEMENT à 49°15′ de Longitude Sud, et 69° 10′ de Latitude Est, c’est-à-dire : pile-poil en plein milieu des Îles Kerguelen. Vous avez prévu des duvets, des duffle-coats, des chapkas ?…

Calvados : Habah, j’étais pas loin, hein.

(Agénor et Lambert déglutissent difficilement)

Justin : Pas loin… N’empêche qu’à pieds.

Calvados : Nan, nan : j’tais pas loin quand j’disais qu’y zallaient nous coller au milieu d’l’Afrique

Abel (Gueule) : HEEEEE, LES VIEUX GARS !!! V’NEZ VOOIIRR !!! VVIITTEE !!!

Calvados : Houlalalalaaaaaa ! Il a quoi, le Abel ?

(Tout l’équipée court vers lui)

L’Abbé : Kikispasse encore ?

Abel (Tout fier) : Ben agardez ça !!! Pis, cette fois : ça sent pas la peinture fraîche, en plus !

(Le Clochier montre alors à ses amis un panneau que tous lisent, dubitatifs : « Carrières de Magnétite – Attention : Sortie de Chantier » )

Calvados : Habah merde, alors ! Bon, ben du coup, Chef, tu peux arrêter de t’moquer des deux rapides là, paskeu, pour une fois, c’est pas de leur faute.

Le Chef : Mouais. Mais, du coup : on a toujours l’cul dans la purée ! Et copieux, même.

L’Abbé : En parlant d’purée, on f’rait mieux d’aller grainer, tiens !

Calvados : Oui l’Abbé, vous avez raison : à table ! Mais, ceci dit, on a la carte déjà, et pis si on sait pas trop, ben on d’mandera à des gens…

Justin : Des gens, des gens… On est sur des routes de Tichats, mon poulot. Pis, et sans vouloir vous vexer M’sieur l’Abbé, hein, l’dernier Père Blanc qu’on a dû voir passer par ici : ça doit pô r’monter à avant-hier, hein.

Calvados : Bon, oki… Mais si c’est pas des gens, ben on d’mandera à des Tichats. Y en a forcément pisk y en a partout dans l’Monde ! Ha ! Bon, et pis dites : on va pas manger froid hein, ca serait pô prudent.

L’Abbé : Houlala nan ! En plus, c’est mon plat préféré les endives gratinées au jambon !

(Calvados rigole sous cape)

Justin : Ben, tiens ! (clin d’œil appuyé)

(Nos aventureux aventuriers s’installent et se mettent à bâfrer, pask y a vraiment pas d’autre mot pour qualifier cet affligeant spectacle gargantuesque !)

Calvados (Mâchouille) : Bon, en tout cas j’me d’mande bien pourquoi on est en train d’se prendre le chou à chercher où on est et où on va, passkeu, si vous r’gardez bien, les chemins : ils sont UN ! Du coup, comme on va pas r’partir en arrière, on a juste à continuer tout droit, pis c’est tout !

Le Chef (Mastique fortement) : Tout droit, tout droit… À travers champs, tu veux dire ?

Calvados : Mais naaannn : sul chemin, pppfffff.

Le Chef : Oui, ça oki, ais ton ch’min y passe à travers champs, c’est s’que j’voulais dire, donc : pas de panneaux ni quoi, va falloir rouler un peu et r’faire un « vrai » point, du coup…

L’Abbé (Mâchouille fortement aussi) Ah ça, force est d’reconnaître… Tiens, passe-moi donc le pinard, seuteuplé ! Nan, pas çuilà : l’ote.

Calvados : Tenez, l’Abbé, habahoui, ça faire un vrai point, j’veux bien participer, ça a l’air trop rigolo vote truc !

Lambert : Oui mais, attassion hein, c’est de la HAUTE technologie, hein, hyper pointue ! Mais on va t’faire montrer comme ça marche, c’est super fastoche en fait, quand t’as pigé l’truc.

Justin : Ô pute vierge !!! En tout cas, y te fait un de ces cagnards !!! Oh bouducon !!!

Calvados : Habahoui, faut même faire gaffe à pas faire la sieste passkeu sinon : on r’part pas !

Amédée : Ah bon, on fait pas la sieste ?

Henry (Gueule les bras chargés de plats fumants et odorants) DEUUUUUXIEME SERVICE !!!

L’Abbé (Braille de satisfaction) : Ouuuuuuaaaaaaaaaaaaaaaaiiiiiiiiiiisssssssss !!!

Calvados : NAN, Amédée : on fait pas la sieste !

Abel : En plus, avec ce soleil on est tranquille : d’après Grand Papy, les voleurs de goûter y zattaquent pas en plein jour.

Calvados (Très las): Ni surtout en plein champ.

Le Chef : *chuchotis* Ça s’rait ptéte pas mal qu’y voille un spécialisse en rentrant lui, nan ?

Calvados : *chuchotis aussi* Oui, j’ commence à y penser très sérieusement.

Le Chef : Pis qu’on discute avec Grand Papy, aussi.

Calvados : Oui mais bon, de s’côté-là c’est pô gagné, hein, pask le Abel, y lâchera pas l’affaire comme ça.

L’Abbé : Perso, j’aurais bien une méthode, mais bon.

Calvados : Oui, mais nan l’Abbé : on va être obligés de l’porter, en plus.

L’Abbé : Ah oui, flûte !

Henry (A la cantonade) : V’là l’frometon, les vieux gars !!!!

Calvados : Oh, pis il est bien fait, dis donc ! Limite y vient tout seul, allez, hop : tournée d’pinard !

(bruit des bouchons que fait sauter Amédée)

Henry : Habah, m’en parle pas mon p’tit frère, j’ai même cru qu’à un moment il allait m’doubler dans la dernière ligne droite !

(Eclat de rire général)

Arthur : Oh dites les gars, agardez : y a un Tichat qu’arrive à pieds là-bas ! On va pouvoir y d’mander note route !

Calvados : Habahoué ! Pas con ça ! (Hèle ledit Tichat à l’air débonnaire) Yep ! Bien l’bonjour l’ami ! V’nez donc boire un coup avec nous, pask fait chaud, hein.

L’Abbé : Oui : viens donc t’asseoir avec nous, mon enfant !

(le Tichat s’approche de la table)

L’Étranger : Ah, bah c’est pas de refus, ma foi.

Calvados : Dites, vous connaissez bien la région ?

L’Étranger : Hobah, mieux qu’le fond d’ma poche droite : chuis un gars du pays, moi, voyez la grande ferme là-haut, sur la colline ?*

Le Chef : Celle où y a des églantines ?

L’Étranger : Oui. Ben, c’est la ferme des Bellons, la plus grosse esploitation agricole à 50 bornes à la ronde ! C’est là où j’habite avec ma p’tite famille, chuis l’Métayer des Tichats des Grands des Bellon.

L’abbé : Et vous vous baladez alentours comme ça, tous les jours ?

L’Étranger : Presque, mais là j’viens de ramener mon copain Albert, qu’a bu, avec sa bagnole, donc du coup j’rentre à pattes. Et vous ?

Le Chef : Ah, alors nous on va à Hainsy-Gransoleil, c’est bien la route ?

L’Étranger : Hainsy-Gransoleil ? Ben, droit d’vant mon gars, droit d’vant, environ 20 bornes.

Calvados : Habah voilà : on est sauvés !

L’Étranger : Et un fichu joli pat’lin, vous verrez, avec une Halle du 18ème, notamment.

Abel : Et, heuu… Y a pas de voleurs de goûter, dans l’coin ?

L’Étranger : Ben, si : y a moi !

Abel : AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !!! (Tombe dans les pommes)

L’Étranger (Éclate de rire) : Nan nan, j’rigole, hein ! Mais ça marche à tous les coups, ça, n’empêche ! Dites : il a l’air émotif le p’tit là, nan ?

L’Abbé : Houlalalalaaaaaa ! Et c’est rien d’le dire.

Calvados : Oui : vraiment TRES émotif ! Et il a une trouille bleue des voleurs de goûter.

Abel (Reprend doucement connaissance) : Ooooooohhhhhh… Ben, kika éteint la mumière ?

Calvados (Sort sa flasque de Calva) : Bois ça, Abel : c’est du brutal, mais ça va t’remette debout !

L’Étranger : Hobah dan l’coin vous êtes tranquilles, par contre, faites gaffe quand vous arriverez vers Fouzy-Sur-Lacourge…

Le Chef : Habah merci, on va éviter l’coin, mais d’après la carte on devrait pas y passer, on va plus au sud.

L’Étranger : Ouais, ben feuzez gaffe kaméme, hein : c’est l’territoire d’la bande de  »Martin 3 Pattes » ! Zont peur de rien ! Zont même attaqué des Gendarmtichats !

L’Abbé : Ben, encore merci pour tout, on va s’préparer et on va r’prendre la route, pask’on a encore du ch’min, mine de rien.

Calvados : Bonne journée, Tichat** ! Et encore merci pour les infos.

L’Étranger : Habah dites, hé, j’y pense : j’va monter avec vous pis vous allez faire un crochet par la ferme ! Comme ça j’va vous donner des produits locaux. Vous r’gretterez pas l’voyage, croyez-moi !

Calvados : Bah, c’est super gentil ça ! Mais, c’est que…

L’Étranger : Ah, et pis j’mappelle Alexandre, au fait, Alex, pour les intimes, Alex  »le Métayer » -vu que j’suis l’Métayer des Tichats des Bellon, donc- ou aussi, Alexandre  »Le Bienheureux », selon certains, paskeu j’prends toujours la vie du bon côté.

L’abbé et Henry (En chœur) : Habah, merci ! Avec plaisir Alex.

Calvados : *chuchotis* Dites les mecs, on est pas en avance du tout, là !

Justin : *chuchotis aussi* Rholalaaaaaa, ppppppffffffff ! Toi et ta foutue « moyenne ».

L’Abbé et Henry : *chuchotitent aussi, du coup* Tu la fermes, oui ? Ou t’as pas UNE, mais DEUX mandales, du coup ! Pask ça va bien à la fin, hein, hé ho, namého !

Le Chef : Pis j’te rappelle qu’on est une Expédition Scien-ti-fique : on doit découvrir et s’intéresser aux choses et aux gens ! Et pis faire des Comptes-Rendus et des Rapports Scien-ti-fi-que-ment-dé-tail-lés !

Sylvain (Jamais en reste) : Ouais, d’abord ! Pis nouer des contacts diplomatiques aussi !

Adrien : Pis goûter et tester les produits du Terroir !

Nicéphore : Et pis filmer et photographier TOUT !

Calvados (Un tantinet vexé et ronchonnant) : Bon, ça va, j’m’incline, si c’est  »scientifique » ! Mais, parti comme c’est parti, on va camper à la ferme d’Alex, si j’comprends bien, hein ? 11 Km en une journée : balaise, les gars ! Balaise!!!

Justin : Oooooohhhhhhhhhhhh, bouducon !!! Mais tu vas pas t’détende, nan ? T’es si pressé qu’ça ???

Calvados : Ouais, ben bien obligé ! Pask j’aim’rais bien arriver s’t’année, MOI !

Justin : Ô pute borgne ! Nan, mais lôte : il est pas parti qu’y veut d’jà ête arrivé !!!! *chuchotis* En plus y sait même pus où vu qu’on est apumés !!! Et pis d’abord : qu’est-ce t’en a à talquer d’cette année, con ? On a 9 vies nous autres, j’te fais rapp’ler !!!

L’Abbé : Oui, il aurait dû s’inscrire aux 24 heures du Mans des Tichats plutôt qu’à une expédition scientifique.

Calvados : Ouais, bah c’est pas exclu que j’fasse ça un jour.

Le Chef : Habah, oublie pas d’nous ramener des rillettes, alors ! Pask c’est drôlement bon ça, les rillettes du Mans !

Alex : Décidément, vous êtes une chouette bande ! Et, vous vous engueulez tout l’temps comme ca ? Ça m’plaît bien !

Arthur : Nan nan : Des fois ça castagne aussi ! Pas vrai M’sieur l’Aumônier ?

L’Abbé (Ricanant à Arthur) Des fois… Des fois… Allez : monte donc avec Calvados, Alex, pis on s’tutoie, hein !

Le Chef : EN AVANT !

(Pétarade générale, cliquetis et bruit des chenilles pour les étourdis qu’auraient oublié ou qui suivraient pas tout bien tout comme y faut…)

Alex : Z’allez voir, nos grands y sont super sympas !

Abel (Grommelle en se trémoussant sur son siège) Rhalalalalaaaaa, les fous !!! On fonce tout droit dans un piège, c’est certain ! Chuis sûr qu’c’est un voleur de goûter, s’gars-là !!! Ptéte même Le Chef !!! J’en mettrais ma patte à couper sul feu comme deux et deux font… Heuuu… Ben, 22, Nan ??? On va s’ retrouver prisonniers des voleurs de goûter, pis cétout !!! Et en plus y rigolent pas avec l’ennemi, ces gars-là !!! Ça va ête terrib’ !!! Terrib’ !!! Attroce, même !!! Horrib’ !!! Et quand y nous auront tués on pourra jamais s’en sortir vivants ! !!!

A suivre…

* 2ème RET : 2ème Régiment Étranger de Ticharachutistes. Troupe Aéroportée de la Légion Étrangère des Tichats, Unité d’Élite de l’Armée des Tichats.

** Les Tichats, entre-eux, et notamment lorsqu’ils s’adressent à un  »inconnu », s’appellent  »Tichat », comme les humains diraient  »Mademoiselle, Madame ou Monsieur » ou encore, plus familièrement  »Ma fille ou mon gars »…