À L’ABORDAGE! (SUITE3)


Quelle fière allure (de loin)! Mais bon, même pas une seule jambe de bois! Pfffff J’vous jure, tout se perd!

En tout cas, la Providence probablement lasse et apitoyée, lui permit d’atteindre le ponton le plus proche en pagayant frénétiquement des mains. Juste le temps de s’y cramponner, que la barcasse s’enfonçait définitivement dans l’eau sans même un glou-glou ou hoquet de regret!

La Bibiche elle, toisait son ex-Capitaine, toute surprise! Enfin, elle se serait exclamée « Ça alors! Mais qui voilà! » si elle avait été dotée de voix. À la place, elle fit grincer sa mâture et ses haubans chuchotèrent.

Quelques pièces de la batterie basse s’interpellèrent en chuintant  » On lui fait une blague? On la déshabille?! » à quoi la plus vieille soupira et chuchota « Naaaan ça va encore faire du foin, et puis je suis chargée d’un boulet! » « Pfffff! Même pas drôle! »

Mais que fichait cette Capitaine sans son Fier Vaisseau, ronchonnant, trempée, sentant la marée et la vase. Son estomac couvrant le bruit du ressac de gargouillis malvenus.

Ce brave Victor n’aurait peut-être pas écrit sa célébrissime citation s’il avait su le destin de certains ou certaines …

« O combien de marins, combien de capitaines, Qui sont partis joyeux pour des terres lointaines, Dans ce morne horizon se sont évanouis! Combien ont disparu, dure et triste Fortune, Dans une mer sans fond, par une nuit sans lune … »

Peut-être qu’a la place il eu écrit:

« O combien de marins, combien de pitoyables capitaines, qui sont partis peinards pour des brigandages incertains, Dans ce morne horizon sont partis et hélas revenus! … » et là, il se serait peut-être mis à boire, le pauvre!

Car …

Nous avions laissé la fameuse « La Fanfreluche » à son mouillage nocturne de Carthagène. Celle-ci chargée, fouets et nerfs-de-bœufs lui avaient retrouvé équipage plus fringuant que le misérable troupeau d’ivrognes qui cuvait dans un hangar vide. D’ici peu, ils allaient pour d’obscures raisons, découvrir les joies d’une vie saine dans de nouvelles mines de sel. Ainsi, la Fanfreluche quittait Carthagène toutes voiles dehors avec un nouvel équipage souffrant fortement du mal de mer malgré le temps calme. Sur la totalité de l’équipage, un cinquième de celui-ci avait vu la mer, et encore, de loin … Quelques pendaisons hâtives eurent vite fait d’ajouter une motivation certaine et de changer les priorités des matelots et mousses. Les soldats du bord faisant des paris sur lesquels seraient pendus en priorité.

Et la Fanfreluche naviguait vers l’ouest soutenue par des vents arrières favorables. Peu de manœuvres, cap plein ouest vers le Nouveau-Monde qui, s’il avait su qu’il était appelé ainsi, en eu été un tantinet froissé.

Jusqu’à ce que La Providence s’étant encore disputée avec la Malchance, la Providence décide de prendre des vacances sur une zoulie plage de sable fin plus au nord. Et c’est ainsi que la Fanfreluche croisa la route de la Biche!

La Biche.

Tout l’équipage de la Fanfreluche écoutant religieusement El Padre Juan « Carne de Gallina » de Ponce y Torquemada ( un lointain cousin du très fameux). Il valait mieux « l’écouter religieusement » … même la vigie était en pleine génuflexion depuis près de 30 minutes tout là-haut dans son tonneau. Il y avait bien le trou de l’ancienne bonde mais que voulez-vous, une estrapade suivie d’une pendaison avant d’être jeté aux requins est si vite arrivée. Les fringants et chamarrés Señores et Tenientes somnolaient plus ou moins vautrés dans de beaux sièges, leurs mouchoirs parfumés les protégeant de l’odeur pestilentielle de la chiourme.

… à suivre! 😉

PS. Toutes mes excuses à ce cher monsieur Hugo.

Votre Paulette.